à l’orée

À genoux dans le gel

perclus

malgré les hasards sur la plage

je masse l’étendue de la mer

caresse à la clé

panoplie ou poussière de viandes

quelle nacre te déterre ?

le bordel suinte par tous les nœuds

2

tendrement menacé

mais la guerre infectant tes gencives

ton genou à vif comme une goutte

calmé mais centuplé par les fontaines

ça grimpe ta moelle et s’accroche à tes glandes

caillé quartz

ça clame dans ton engrenoir

écueils en coups de poing sur la glotte

ça gratte ton poison ça darde et ça crêpe

même le venin te harnache

et toute la racaille printanière vient te renifler dans les coins

3

là où le pire n’a plus de prise

défenestré par la poigne macabre

ça culbute et ça plonge aux racines de la colère

là où ça boit le flanc de ton univers

il suffoque,

le
Nul !

étrier vidé de sa proie

il a beau secouer le cornac et la crème

le
Corse abatteur de charmes

la brute à fleur de voie lactée te corsète de sourires

Tape sa mort contre terre !

tape son tempérament !

tape son entêtement contre tous les néants !

— le blasphème te pardonnera

4

l’ancre jetée en nasse violette c’est au tour du soleil de clamser le bord-à-bord du vertige lui échoit

pourvu que ça bouscule le courage

c’est le signal

pourvu que les maisons se dissolvent dans le ça

c’est le chemin

avance, avance, avance

les horizons se rabibochent avec la cendre

tout le paysage est flasque

et tu t’étales dans un grand murmure de veau écrasé

5

« on ne sait jamais » dit l’ombre quatre

les serrures sont bloquées

les drapeaux ont foutu le camp

ne reste que le sel sur la langue et ces familles affreuses

ne reste que l’écorce écorchée la glèbe

la mélancolie banlieusarde des papiers glissés sous la porte

mais non

je me trompe — loup-de-mer —

les montagnes de joie sont là

DEBOUT
COMME
DES
MARCHANDES
DE
POISSON

6

jamais je n’ai su compter jusqu’à l’océan
Pacifique

pourtant

quelle vie de boules nous menions sur le tapis vert

la nuit naît de cette nappe de nerfs

la lune est un crochet du gauche

et quand je me voile sous le linceul du silence

quelque chose en moi réclame la qualité

je ne sais cette chanson éraillée pour les vieux

ma jeunesse se targue

et quand je me promène sur la scène

le théâtre se coquillage et le souffleur se perle

7

puissante est la passion

puissante la déraison

puissante la force d’attraction

puissante la terre sans frontières

— puissante la calme femme sans chapeau

ivre d’aller de l’homme à la liberté

mais pour contrecarrer l’action coercitive

la puissance des lampes de la poitrine

tout ce que le cœur a de lames et de marées

les coups de barre dans le noir

l’ample désespoir sous sa couverture de palmes

le psaume, même

ne suffisent jamais

ce qu’il faut

c’est une bille dans ton numéro 77

basta !

8

Toi qui ne recules devant rien coup d’archet du tigre monument échevelé du charme fusais

tu sais que cette tragédie infime

chaque jour

se répercute à gogo dans tous les miroirs de poche

et que ‘essentiel

c’est de jeter la quatrième arche

par-dessus les cris

par-dessus (?) par-dessous (?)

partout (?)

là où il y a du bruit des à-peu-près et du crime

ici.

Voter pour ce poème!

Nérée Beauchemin Apprenti Poète

Par Alain Jouffroy

Alain Jouffroy est un poète, écrivain et critique d'art français né le 11 septembre 1928 à Paris et mort le 20 décembre 2015 dans la même ville.

Ce poème vous a-t-il touché ? Partagez votre avis, critique ou analyse !

Les mots sont les pierres précieuses de la poésie. Partagez les vôtres ici.
S’abonner
Notifier de
Avatar
guest
0 Avis
Inline Feedbacks
View all comments

Un pouacre

Les récoltes