Ville

Il ne suffit pas d’un tas de maisons pour faire une ville

Il faut des visages et des cerises

Des hirondelles bleues et des danseuses frêles

Un écran et des images qui racontent des histoires

 

Il n’est de ruines qu’un ciel mâché par des nuages

Une avenue et des aigles peints sur les arbres

Des pierres et des statues qui traquent la lumière

Et un cirque qui perd ses musiciens

 

Des orfèvres retiennent le printemps dans des mains en cristal

Sur le sol des empreintes d’un temps sans cruauté

Une nappe et des syllabes déposées par le jus d’une grenade

C’est le soleil qui s’ennuie et des hommes qui boivent

 

Une ville est une énigme leurrée par les miroirs

Des jardins de papier et des sources d’eau sans âme

Seules les femmes romantiques le savent

Elles s’habillent de lumière et de songe

 

Métallique et hautaine,

La ville secoue sa mémoire

En tombe des livres et des sarcasmes, des rumeurs et des rires

Et nous la traversons comme si nous étions éternels.

 

Tahar Ben Jelloun

Paris, le 11 novembre 2005

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