Méditation poétique et littéraire

On écrivait encore, en ces temps romantiques

Où les chants de Ducis étaient des émétiques,

Où, sans pourpoint cinabre, on se voyait banni,

Où Prudhomme, ravi de tomber avec grâce,

Était jeté vivant dans une contre-basse

Pour avoir contesté les vers de Hernani.
On écrivait, tandis que maintenant on gèle.

Où sont les Antony, les Ruy-Blas, les Angèle,

Et ces jours, morts, hélas !

Où Frédérick, faisant revivre Aristophane,

Sous le mépris des sots et la robe d’un âne

Cachait Tragaldabas ?
On écrivait, au sein de l’antique Bohème

Où le chat de Mimi brillait sur le poëme,

Où Schaunard éperdu, dédaignant tout poncif,

Si quelqu’un devant lui vantait sa pipe blonde,

Lui répondait : « J’en ai pour aller dans le monde

Une plus belle encore, » et devenait pensif.
Aujourd’hui Weill possède un bouchon de carafe,

Arsène a des maisons, Nadar est photographe,

Véron maître-saigneur,

Fournier construit des bricks de papier, et les mâte,

Henri La Madelène a fait du carton-pâte :

Lequel vaut mieux, Seigneur ?

Décembre 1856.

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Théodore de Banville Apprenti Poète

Par Théodore de Banville

Etienne Jean Baptiste Claude Théodore Faullain de Banville, né le 14 mars 1823 à Moulins (Allier) et mort le 13 mars 1891 à Paris, est un poète, dramaturge et critique français. Célèbre pour les « Odes funambulesques » et « les Exilés », il est surnommé « le poète du bonheur ».

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Le bruit des cabarets, la fange du trottoir

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