Un vide

Imaginons : j’ai fait fortune

dans les genoux artificiels,

les éventails de nacre,

les fausses dents.

La cinquantaine atteinte,

j’ai divorcé pour mieux courir les gourgandines

et les danseuses

qui, vers trois heures du matin, crachent le sang.

J’ai payé cher

pour ne jamais revoir mes fils :

l’aîné, un gigolo ;

et l’autre, une poule mouillée.

Hôtel de passe,

hôtel de luxe :

divine alternative !

Au poker je ne joue qu’avec les malfaiteurs,

pour apprendre comment ils trichent.

J’aime les guerres,

cigare en bouche,

devant un cinzano.

Parfois je donne cent dollars

pour les enfants de
Roumanie :

ils iront dans la poche

d’un colonel très moustachu.

Je ne lis plus que les journaux :

pronostics, mots croisés, cours en

Bourse.
Je ne sais pas ce qu’est

la poésie.
L’an prochain, à

ma mort, je ne laisserai rien,

pas même un vide au cœur de mes amis.

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Alain Bosquet Apprenti Poète

Par Alain Bosquet

Anatole Bisk, dit Alain Bosquet, né à Odessa (Ukraine) le 28 mars 1919 et mort à Paris le 17 mars 1998, est un poète et écrivain français d'origine russe.

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Ce n’est le fleuve tusque au superbe rivage

En cour d’assises