La Coupe

Le poëte en sa coupe, orgueil du ciseleur,

S’enivre, et boit le vin amer de la douleur.

Puis, après avoir bu le vin, il boit la lie

Où dorment la tristesse et la mélancolie.

Et puis, après la lie encore, tout au fond,

Dorment en un flot noir l’accablement profond

Et l’inutile amour de l’Idéal qui lève

Son front chaste, et l’horreur effrayante du rêve.

Et comme, en regardant longtemps ce flot moqueur,

Le poëte qui sent se soulever son coeur,

A dans ses sombres yeux l’égarement d’Oreste,

La Muse lui dit: Mon bien-aimé, bois le reste!
Paris, le dimanche 5 septembre 1886.

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