Chanson violette

Et ce soirlà, je ne sais,
Ma douce, à quoi tu pensais,
Toute triste,
Et voilée en ta pâleur,
Au bord de l’étang couleur
D’améthyste.

Tes yeux ne me voyaient point ;
Ils étaient enfuis loin, loin
De la terre ;
Et je sentais, malgré toi,
Que tu marchais près de moi,
Solitaire.

Le bois était triste aussi,
Et du feuillage obscurci,
Goutte à goutte,
La tristesse de la nuit,
Dans nos coeurs noyés d’ennui,
Tombait toute…

Dans la brume un cor sonna ;
Ton âme alors frissonna,
Et, sans crise,
Ton coeur défaillit, mourant,
Comme un flacon odorant
Qui se brise.

Et, lentement, de tes yeux
De grands pleurs silencieux,
Taciturnes,
Tombèrent comme le flot
Qui tombe, éternel sanglot,
Dans les urnes.

Nous revînmes à pas lents.
Les crapauds chantaient, dolents,
Sous l’eau morte ;
Et j’avais le coeur en deuil
En t’embrassant sur le seuil
De ta porte.

Depuis, je n’ai point cherché
Le secret encor caché
De ta peine…
Il est des soirs de rancoeur
Où la fontaine du coeur
Est si pleine !

Fleur sauvage entre les fleurs,
Va, garde au fond de tes pleurs
Ton mystère ;
Il faut au lis de l’amour
L’eau des yeux pour vivre un jour
Sur la terre.

Au jardin de l’infante

Voter pour ce poème!

Albert Samain Apprenti Poète

Par Albert Samain

Albert Samain, né le 3 avril 1858 à Lille et mort le 18 août 1900 à Magny-les-Hameaux, est un poète symboliste français.

Ce poème vous a-t-il touché ? Partagez votre avis, critique ou analyse !

Votre commentaire est une perle dans notre océan de vers. Plongez avec élégance.
S’abonner
Notifier de
Avatar
guest
0 Avis
Inline Feedbacks
View all comments

Petit coucher

Malheur à moi