L’Aveugle

Un cavalier disait à Milton : « Je vous plains !

Car vos yeux, de colère et d’espérance pleins,

Qui déchiraient la voûte où le soleil gravite,

S’égarent, fous d’horreur, dans la nuit sans limite.

Comme un aigle banni du mont aérien

Dans un sombre cachot, vous ne voyez plus rien

Sur cette terre aux feux du ciel irradiée ;

Ni le couchant avec sa pourpre incendiée,

Ni le terrible azur et la blancheur des lys !

— Il est vrai, dit Milton, que mes regards, jadis

Plus éclatants que ceux des poètes célèbres,

Succombent maintenant sous d’épaisses ténèbres :

Mais c’est parce que Dieu, voyant mes ennemis

Jaloux de cette paix profonde où je frémis

Seulement d’allégresse en chantant ses louanges,

A pour me soutenir envoyé ses grands Anges.

Calmes, armés du glaive et répandant l’effroi,

Invisibles pour tous, ils volent devant moi

Épouvantant ma face et cachant mes prunelles,

Et cette nuit farouche est l’ombre de leurs ailes. »
Nice, mai 1860.

Voter pour ce poème!

Théodore de Banville Apprenti Poète

Par Théodore de Banville

Etienne Jean Baptiste Claude Théodore Faullain de Banville, né le 14 mars 1823 à Moulins (Allier) et mort le 13 mars 1891 à Paris, est un poète, dramaturge et critique français. Célèbre pour les « Odes funambulesques » et « les Exilés », il est surnommé « le poète du bonheur ».

Ce poème vous a-t-il touché ? Partagez votre avis, critique ou analyse !

La poésie transcende le temps. Écrivez comme Baudelaire, commentez comme Aragon, et laissez votre empreinte.
S’abonner
Notifier de
Avatar
guest
0 Avis
Inline Feedbacks
View all comments

L’arbre-sec

Déclin