Adieu

Adieu

Vents de passage

Voilez mon visage

Et mon repos du long drap bleu

De l’été

Liberté

Pourquoi marcher toujours

Entre les murs d’une saison

La rose penchée hors du temps

Sent si bon

Adieu ! Si le merle en passant

Frappe à ma porte

Dites que je suis morte

D’avoir fait éclater dans mon chant

La grenade du jour

Je regarde encore une fois

La haute rose

Pendant que s’éloigne de moi

Le bruit des choses

Qu’ils sont beaux les derniers appels

De la vie

Adieu

Je meurs d’une chute infinie Dans l’eau du ciel

Ce dernier chant

O mes oiseaux mes fontaines

M’arrachera les veines

Et le sang

Peut-être ailleurs

Recommencer

Trois oliviers

Couronnés d’air

Et d’étourneaux

Le long balancement des mers

L’heure

Pour des levers royaux

Parée

Les fleurs

Même perdues sous la neige

Et brisées

Sans les feux les parfums

Qui affolent l’abeille

Les fleurs sont lumière

Mornes flûtes

Quand reviendront sur terre les rossignols

Et le vent doré des lucioles

Les feuilles de mon arbre Seront tombées

Dans les ombres de mon jardin J’ai semé la beauté Quelqu’un tout à côté S’en vint Semer la mort

Et moi sans fin

J’entends sous terre chuchoter

Qui de nous sortira d’abord

Poésie ombre absoute

Du beau mensonge aussi

Qui fut mon compagnon de route

J’ai pris congé

Que la dernière abeille plie ses ailes

Les mots ne refleuriront plus ici

Et pourtant la prairie fut si belle

Sans bruit

On a séché le puits

Aux voyelles

Le merle est pris

Ce n’est pas lui

Qui clamera sur les murailles

Le retour des primevères

Au cœur du jour il se débat

Personne pour couper les mailles

De son enfer

Et si les primevères aussi Ne revenaient pas

O l’ineffable errance

Je passerai sous les merles tranquilles

Je cueillerai les fleurs

Absolues du silence

Je lirai l’heure

A l’horloge immobile

De la perpétuelle enfance

Mourir en douce

Sans avoir dit un mot

De trop

Sans que l’âme éclabousse

La rue

Quitter la vie

Comme un fleuve ingénu

Remonterait sans bruit

Vers sa source

Qu’un saule blanc soit mon linceul

Un saule la trame dorée

Des phalènes d’été

Sur ma plainte qui s’en va seule

A la rencontre des oiseaux

Immémoriaux

Cette lumière au bout du champ Serait-ce l’ombre ardente D’une main qui se tend

Ah! que m’aspire me déchire

L’océan—-

Qui peut me retenir

Quelle voix dans le vent

Pourrait couvrir l’appel du goéland

Pour mon trépas

O deuil le temps a retiré

Sa couronne d’oiseaux

Où je serai

Ne seront avec moi que les voix

Monacales des eaux

Sous les cendres de mon jardin Mettons en terre le mal le bien Désormais frères qu’ils reposent Coeur diamantin

Le reste secret des roses

Maintenant qu’on me laisse partir

Menthe glacée

Mangue dorée

Qu’on me laisse tomber

Dans la profonde éternité

De saphir

Comme les voyageurs s’en vont

Pour ne plus revenir

Comme les papillons

Regagnent pour mourir

Les grands vergers mûrs des étoiles

Je pars vers le flamboyant rien

Vos chants ne m’auront pas trompée

Oiseaux vous seuls

Merci de m’avoir entraînée

Trop loin

Le jour se tait dans les roselières Le temps clapote j’erre Autour de mon bel adieu Un oiseau pâle aux cieux Hâte son vol

Sur les eaux noires les lucioles Mettent la mort à feu

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Anne Perrier Apprenti Poète

Par Anne Perrier

Anne Perrier est une écrivaine et poétesse vaudoise née à Lausanne le 16 juin 1922 et morte le 16 janvier 2017 à Saxon.

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