Chant royal

Considérez que guerre, l’immortelle,
Par son regard fier les courages tente ;
Dissension, héritier de cautelle,
Loge Fureur en pavillon ou tente :
Vengeance sort, laquelle essaye ou tente
De succomber ses ennemis mortels,
Remémorant qu’en guerre sont morts tels
Qui en France portent un grand dommage,
Mêmes perdu or, argent et alloy,
Par défaut de croire en maint passage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Guerre trépigne, et vacille et chancelle ;
Sans fin mengue, jamais ne se contente ;
Aucunes fois machination cèle
L’intention qui dut être patente ;
Simulateurs vont par oblique sente ;
Fraudulateurs pillent maisons, hôtels ;
Biens pris, saisis, ravis, gâtés, ôtés.
Satalites font aux métaux hommage ;
Haine sonne la campane ou beffroi ;
Force ne croit, tant a cruel courage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Trahison bâtit invention nouvelle,
Feignant d’être morne, pensive et lente ;
Du premier coup son penser ne révèle,
Plus petite est que ciron ou que lente ;
Mais fausseté ès coeurs des seigneurs l’ente,
Si très avant qu’enfin en sont notés ;
Félonie épand de tous côtés
Glaives tranchants et en fait labouraige,
Que discord queult et attribue à soi
Sans redouter, recueillant cet ouvrage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Fortune tient tous humains en tutelle,
Les plus grands fait servir par folle attente.
Vulcanus fond, Mars sans cesser martelle.
Et Midas met leurs ouvrages en vente ;
Clotho les prend, Lachesis les présente
A Atropos, et sont revisités
Par preux hardis, en la guerre usités,
Qui les livrent à gens de moyenne âge,
Les désirants plus qu’amoureux le Moy ;
Et ne craignent en soleil ou ombrage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Quand Neptunos met sur mer sa nacelle,
Que Boréas de subit soufflet vente,
Et que Pluto les autres dieux precelle,
Guerre montre sa queue de serpente ;
Si Palas n’est pour l’heure diligente
De résister à leurs férocités :
Ils font trembler palais royaux, cités,
En l’air causent frimas, éclair, orage ;
Lors les soudards, qui mènent leur arroi,
Ne prisent rien, tant sont remplis de rage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Prins ce, seigneurs, ne soyez irrités
Si peine avez, car vous le méritez :
Tous malfaiteurs se mettent en servage ;
Force leur est de recevoir chastoy,
Quand s’efforcent dépriser par outrage
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

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