Sujet de la comédie des fleurs

L’auteur étant prié par des belles dames de leur faire promptement

une pièce de théâtre pour représenter à la campagne, et se voyant

pressé de leur écrire le sujet qu’il avait choisi pour cette comédie,

à laquelle il n’avait point pensé, leur envoya les vers qui suivent.
Puisqu’il vous plaît que je vous die

Le sujet de la comédie

Que je médite pour vos soeurs ;

Les images m’en sont présentes,

Les personnages sont des fleurs

Car vous êtes des fleurs naissantes.
Un lys, reconnu pour un prince,

Arrive dans une province ;

Mais, comme un prince de son sang,

Il est beau sur toute autre chose ;

Et vient, vêtu de satin blanc,

Pour faire l’amour à la rose.
Pour dire qu’elle est sa noblesse

A cette charmante maîtresse

Qui s’habille de vermillon,

Le lys avec des présents d’ambre

Délègue un jeune papillon,

Son gentilhomme de la Chambre,
Ensuite le prince s’avance

Pour lui faire la révérence ;

Ils se troublent à leur aspect

Le sang leur descend et leur monte :

L’un pâlit de trop de respect,

L’autre rougit d’honnête honte.
Mais cette infante de mérite,

Dès cette première visite,

Lui lance des regards trop doux

Le souci qui brûle pour elle,

A même temps en est jaloux,

Ce qui fait naître une querelle.
On arme pour les deux cabales.

On n’entend plus rien que tymbales ;

Que trompettes et que clairons ;

Car, avec tambour et trompette,

Les bourdons et les moucherons

Sonnent la charge et la retraite.
Enfin le lys a la victoire ;

Il revient couronné de gloire,

Attirant sur lui tous les yeux.

La rose, qui s’en pâme d’aise,

Embrasse le victorieux ;

Et le victorieux la baise.
De cette agréable entrevue,

L’absinthe fait, avec la rue,

Un discours de mauvaise odeur

Et la jeune épine-vinette,

Qui prend parti pour la pudeur

Y montre son humeur aigrette.
D’autre côté, madame ortie,

Qui veut être de la partie

Avec son cousin le chardon,

Vient citer une médisance

D’une jeune fleur de melon

A qui l’on voit enfler la panse.
Mais la rose enfin les fait taire,

Par un secret bien salutaire,

Approuvé de tout l’univers.

Et dissipant tout cet ombrage,

La buglose met les couverts

Pour le festin du mariage.
Tout contribue à cette fête.

Sur le soir un ballet s’apprête,

Où l’on ouit des airs plus qu’humains

On y danse, on s’y met à rire.

Le pavot vient, on se retire ;

Bonsoir, je vous baise les mains.

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François Tristan L'hermite Apprenti Poète

Par François Tristan L'hermite

François L'Hermite, sieur du Solier, dit Tristan L'Hermite, né en 1601 au château du Solier, près de Janaillat dans la Marche, et mort à Paris le 7 septembre 1655, est un écrivain et gentilhomme français.

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Mémère

J’ai une pipe…