Je voudrais aller me promener dans les bois

Je voudrais aller me promener dans les bois ;
j’aurais un grand chapeau, une robe légère,
je me griserais d’air et de bonne lumière,
et tu me rapprendrais à marcher à ton bras.

Je voudrais aller dans un grand bois, un vieux bois,
où l’on dit que les fées se promènent encore ;
peutêtre en attendant du soir jusqu’à l’aurore,
qu’une d’elles nous laisserait ouïr sa voix.

Moi je n’ai pas vu d’arbres depuis si longtemps,
ni de fleurs dans les jardins ! Celles que tu portes,
et que tu poses sur mon lit, à moitié mortes,
achèvent de mourir dans les appartements.

Ce ne sont pas de vraies fleurs libres sous le ciel ;
elles ont des robes rouges trop tuyautées,
puis, sur les draps, on dirait des taches figées,
taches de sang qui font plus pâles mes mains frêles.

J’aime mes mains à présent, elles sont si blanches !
je vois les petites veines bleues sous la peau,
je n’ai gardé à ma main gauche que l’anneau,
l’anneau d’or que tu m’as donné avec ton âme.

Mes pauvres mains ont l’air si lasses sur les draps !
Ah ! je voudrais sortir, marcher, je me sens forte,
je voudrais fuir bien loin, et refermer la porte
sur cette chambre monotone de malade.

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