à
Marc
Gérenton
Le sommeil est un navire qui garde la houle au dedans et le ciel au dedans et l’infiniment bleu de la mer ou de la nuit qui se rêve.
On a posé nos têtes sur du sable, posé nos têtes sur des épines, sur un sol dur chargé d’odeurs, nos têtes de mort ou de folie, nos têtes de vide et de vie.
Le temps a mis son masque quotidien, moisson de mensonges sur la peau, réseau de signes noirs où le sens laisse goutte à goutte le sang de sa mémoire.
Le sable, lui, se souvient d’une forêt sans limite avec ronces et clairières, feux de fougères, de foudre, cristaux de légendes.
Où vont nos têtes déraisonnables, à l’aplomb de quelle absence, en exil de quel corps ?
Elles flottent sur des ombres comme des noix de néant,
des noix creuses, dépulpées, qui sortent d’un naufrage pour entrer sans frayeur dans une perdition sèche, un état d’âmes désertées.
Des gisants il ne reste que du papier journal, un peu d’effroi froissé contre des bouches closes.
Le sommeil efface toute trace
et nos tombeaux.