Réplique

Le perdreau, sur son plat d’argent,

Bien enveloppé dans sa barde,

Avait un bel air engageant.

Il eût même inspiré le barde.
En le voyant, Rose et Ninon,

Ces tendresses que l’on achète

Et qui ne disent jamais: Non,

Tourmentaient déjà leur fourchette.
Rose, qui plaît à don Pedro,

Grand d’Espagne aux sourcils d’ébène,

Dit alors au perdreau: Perdreau,

Vois! pour toi quelle heureuse aubaine
D’être enfin savouré, mon cher,

Par de si belles demoiselles,

Qui vont se nourrir de ta chair

Et se régaler de tes ailes!
Telle Rose, par un circuit,

S’égarait en discours frivoles.

Mais le perdreau, bien qu’il fût cuit,

Prononça de sages paroles.
Etre mangé n’est pas un mal,

Dit-il, et c’est la fin morose

De n’importe quel animal.

Sache-le pourtant, jeune Rose,
Fille plus folle que la mer

Fertile en farces incongrues,

A nous, perdreaux, il semble amer

D’être dévoré par des grues!
15 septembre 1888.

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Théodore de Banville Apprenti Poète

Par Théodore de Banville

Etienne Jean Baptiste Claude Théodore Faullain de Banville, né le 14 mars 1823 à Moulins (Allier) et mort le 13 mars 1891 à Paris, est un poète, dramaturge et critique français. Célèbre pour les « Odes funambulesques » et « les Exilés », il est surnommé « le poète du bonheur ».

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