Ouverture

De nouveau

mon aimée

la parole est urgente

Elle n’a jamais cessé de l’être

et depuis L’Arbre de fer

il y a eu le sang

les crucifiés de l’espoir

Il y a eu le déchaînement de la horde

tant de frères de combat

emmurés dans les cavernes de la nuit bestiale

la fine fleur de notre pays

déracinée

écrasée à l’aube intense de son message

Il y a eu ce petit corps mutilé grandi

à l’horizon des certitudes tant de meurtres

tant de deuils mais aussi tant de joies sur

les multiples fronts du soleil Hô Chi Minh est maintenant parmi nous

nous épaule Jérusalem vient à notre

rencontre Lisbonne nous réchauffe

et notre Afrique s’est délié les c

hevilles se refait une beauté Il y a eu

notre poème permanent mûrissant

pendant tout ce temps que nous avons

tenu entre nos doigts comme un oiseau apprivoisé

le nourrissant de rêves équitables

lui ménageant dans notre flanc un nid

d’irrépressible liberté

Comme nous avons rajeuni

ma bien-aimée

de toutes nos épreuves conjuguées

maîtrisées Nous avons tressé la voie

conduisant à cette fête de jouvence

qui viendra assurément pour toi

pour moi pour tous ceux qui luttent

et espèrent

De nouveau

mon aimée

la parole est urgente

C’est vrai

elle n’a jamais cessé de l’être

La poésie doit rythmer nos semailles

célébrer nos moissons

sans cesse et partout

rendre insupportables nos chaînes

Mais vois-tu

le chant exemplaire

est un rameau de roses réticentes

qui n’éclosent

que lorsque le cœur qui les porte

ne peut plus du sang

ne peut plus du silence

ne peut plus de sa patience

2.

J’en appelle

à un nouveau lyrisme

qui réinsère l’homme

dans nos œuvres de beauté

pas l’homme abstrait des manuels poussiéreux

mais l’homme qui totalise

en rêves et en actes

tous les hommes assiégeant le réduit des barbaries

J’en appelle

à un nouveau réalisme

où rien ne sera interdit

à nos visions

des continents non explorés

du futur

à notre rire

face aux tares résurgentes

de notre ancienne vieillesse

Un réalisme

qui parle de notre planète

non pas comme d’un capharnaum

manifestant l’écrasement

l’absence de l’homme

mais comme une terre humaine

enrichie des créations

du maître et possesseur de la nature

l’humanisant à mesure

de ses victoires

s’emparant des objets de son intelligence

comme autant d’auxiliaires

prolongeant ses mains

et qu’il meut

en harmonie avec ses besoins réels

J’en appelle à la beauté qui sera front d’espoir

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André Lemoyne Apprenti Poète

Par Abdellatif Laâbi

Abdellatif Laâbi, né à Fès en 1942, est un poète, écrivain et traducteur marocain. Il a fondé en 1966 la revue Souffles qui jouera un rôle considérable dans le renouvellement culturel au Maghreb. Son combat lui vaut d'être emprisonné de 1972 à 1980.

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