La gomme coule…

I
La gomme coule en larmes d’or des cerisiers.

Cette journée, ô ma chérie, est tropicale :

Endors-toi donc dans le parterre où la cigale

Crie aigrement aux cœurs touffus des vieux rosiers.
Dans le salon où l’on causait, hier vous posiez…

Mais aujourd’hui nous sommes seuls — Rose Bengale !

Endormez-vous tout doucement dans la percale

De votre robe, endormez-vous sous mes baisers.
Il fait si chaud que l’on n’entend que les abeilles…

Endors-toi donc, petite mouche au tendre cœur !

Cet autre bruit ?… C’est le ruisseau sous les corbeilles
Des coudriers où dorment les martins-pêcheurs…

Endors-toi donc… Je ne sais plus si c’est ton rire

Ou l’eau qui court sur les cailloux qu’elle fait luire…
II
Ton rêve est doux — si doux qu’il fait bouger tes lèvres

Tout doucement, tout doucement — comme un baiser…

Dis, rêves-tu que sur un roc vont se poser

Parmi des thyms chèvrefeuilles de blanches chèvres ?
Dis, rêves-tu que sur la mousse, en notes mièvres,

La source pure au fond du bois vient à jaser.

— Ou qu’un oiseau tout rose et bleu s’en va briser

Les fils de Vierge et faire au loin s’enfuir les lièvres ?
Rêves-tu que la lune est un hortensia ?…

— Ou bien encor que sur le puits l’acacia

Jette des fleurs de neige d’or sentant la myrrhe ?
— Ou que ta bouche, au fond du seau, si bien se mire,

Que je la prends pour une fleur qu’un coup de vent

A fait tomber, du vieux rosier, dans l’eau d’argent ?

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Francis Jammes Apprenti Poète

Par Francis Jammes

Francis Jammes, né à Tournay le 2 décembre 1868 et mort à Hasparren le 1ᵉʳ novembre 1938, est un poète, romancier, dramaturge et critique français. Il passa la majeure partie de son existence dans le Béarn et le Pays basque, principales sources de son inspiration.

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